En juillet, en pleine canicule, quoi de plus pertinent que de discuter de la neige et de sa mesure ? Dans ce nouvel article HD Science nous allons tout d’abord expliquer, qu’est-ce que la neige ? Comme nous le racontions dans un précédent article, la neige est un phénomène atmosphérique qui se forme lorsque la température dans les nuages est inférieure au point de congélation. Des gouttelettes d'eau super-froides se cristallisent autour de particules en suspension dans l'air, créant des cristaux de glace. Ces cristaux se regroupent pour former des flocons de neige. Si l'air reste suffisamment froid pendant leur chute, les flocons atteignent le sol sans fondre, recouvrant le paysage d'un manteau blanc. Les flocons de neige peuvent prendre des formes variées, influencées par les conditions de température et d'humidité rencontrées durant leur formation.
En effet, les flocons de neige peuvent être légers et volatiles, souvent portés par le vent, on appelle alors cela de la “neige sèche”, qui est poudreuse et ne colle pas. Alors que la “neige humide” et la “neige mouillée” sont plus lourdes et collantes, et sont souvent dues à des températures plus proches de 0°C.Nous avons vu précédemment plusieurs façons de mesurer la pluie (par des méthodes conventionnelles comme le pluviographe ou le radar, des satellites, des liens microondes sol-sol ou sol-satellite), mais du fait des caractéristiques particulières de la neige, la mesure de celle-ci s’organise un peu différemment, et c’est ce que nous allons voir dans cet article.
Mesurer de manière précise la neige est un défi, et actuellement on procède de deux façons différentes : soit on mesure le flux de neige, soit on mesure le stock de neige. Ces deux procédés peuvent être réalisés par de nombreux types d’instruments, parfois très différents les uns des autres, comme nous allons le voir ici.
Ce que l’on entend ici par flux de neige est la neige qui tombe du ciel à un instant T. La mesure de ce flux est très similaire à ce que l’on a pu voir précédemment sur la pluie.
En effet, de la même manière que la pluie, on peut mesurer la neige avec un instrument similaire à un pluviographe, comme par exemple avec des pluviographes chauffants ou le nivomètre de Nipher. Ces instruments sont munis d’une résistance qui permettent de chauffer la neige et de la transformer en eau pour la quantifier. On a donc comme résultat une mesure de hauteur d’eau ou équivalent en eau de la neige.
Pour les radars météorologiques, tous ne mesurent pas la neige, mais seulement quelques types comme les radars Doppler ou à double polarisation par exemple. Dans les pays riches, dans les zones où la neige est possible, il sera souvent installé ces types de radars pouvant détecter et mesurer la neige, ce qui permet, comme pour la pluie, d’avoir une mesure relativement précise sur une grande surface à partir d’un seul point. Toutefois, comme on l’a vu dans un article précédent, le radar météorologique est fortement limité dans les zones escarpées. Or ces zones sous des latitudes tempérées sont souvent sujettes à des précipitations neigeuses.
La mesure du stock désigne l'ensemble des techniques et méthodes utilisées pour quantifier et évaluer la quantité de neige présente sur une zone donnée. Cette mesure de neige a un avantage non négligeable par rapport à la mesure du flux, puisqu’elle renseigne sur le stock donc, les précipitations (la neige qui s’ajoute au stock), mais aussi sur la fonte de la neige (la neige qui se soustrait au stock). Pour quantifier ce quantité de neige, on peut tout d’abord tout simplement mesurer la hauteur de neige.
La méthode historique est la mesure à l’aide d’une échelle graduée de la hauteur de neige. Pour cela elle est placée dans un lieu relativement plat et peu exposé aux vents. La hauteur de neige est récupérée alors la plupart du temps manuellement tous les jours.
Cette mesure peut aussi s’effectuer de manière automatique avec par exemple des capteurs ultrasons. Le capteur émet un ultrason en direction du sol, et en fonction du temps que met l’écho de cette onde pour revenir vers le capteur, on en déduit l’épaisseur de la couche neigeuse au dessus du sol.
De plus, depuis plusieurs années, une nouvelle technologie est apparue pour la mesure de la neige : la mesure de neige à partir du rayonnement cosmique naturel. Les nivomètres à rayonnement cosmique (NRC) mesurent la quantité de neutrons présents au sol. Or la neige est riche en hydrogène qui absorbent les neutrons, ce qui réduit le nombre de neutrons détectés. On peut alors quantifier l’équivalence en eau de la neige présente au sol en comparant à la quantité de neutrons mesurée lorsqu’il n’y a pas de neige.
Nous venons de voir plusieurs instruments qui permettent de mesurer la quantité de neige ou son équivalence en eau. De nombreux autres instruments existent, de manière plus ou moins opérationnelle, mais tous mesurent le flux ou le stock comme nous l’avons présenté. Toutefois, pourquoi ne pas se contenter des instruments existants et utilisés par les services météorologiques ? C’est dû aux difficultés à quantifier la neige, son flux ou son stock de manière précise spatio-temporellement.
En effet, la neige est difficile à mesurer pour plusieurs raisons. Déjà, de la même manière que la pluie, les chûtes de neige sont très hétérogènes spatio-temporellement. Il faut alors avoir un réseau dense de capteurs, ou un capteur permettant de mesurer à haute résolution sur une grande surface, comme le radar, mais avec les limites que l’on a précisé plus tôt. Le satellite peut aussi être une solution, mais à l’heure actuelle, il ne permet de donner qu’une information sur l’étendue spatiale de la couche de neige au sol, sans information sur son épaisseur.
D’autre part la neige est beaucoup plus volatile et sensible au vent que la pluie, ce qui augmente les erreurs pour les mesures à l’aide de pluviographes, car des tourbillons peuvent se créer à l’entrée de l’instrument, déportant les flocons hors de l’instrument. Mais cela peut être aussi un problème pour les instruments qui mesurent le stock, avec la neige qui peut être balayée par le vent et accumulée ou dispersée sur la zone de mesure.
De plus la neige se compacte sous son propre poids, ce qui peut amener à une sous-estimation du stock réel de neige si on ne le prend pas en considération.
Enfin, la neige est très présente dans les zones de reliefs, et il est difficile de mesurer un stock dans une zone fortement pentue. En effet, comme on l’a vu précédemment, tous les instruments mesurant un stock avaient besoin d’une zone plate plus ou moins grande.
Mais à la vue de la difficulté de mesurer la neige, on peut se demander à quoi bon faire tout cela ? A quoi cela nous sert-il ?
Mesurer la neige nous permet tout d’abord de prévoir les ressources en eau, la neige fondue alimentant les réserves d'eau. En effet, elle est un contributeur important au débit de fleuves comme la Garonne ou le Rhône, mais est aussi une contribution importante des lacs de barrages qui sont une source essentielle d’eau et d’électricité en France.
De plus, mesurer la neige est une information importante pour la gestion du tourisme en montagne et des sports d’hiver, notamment pour la gestion du risque d’avalanche, qui est une cause importante de dommages matériels et humains en France, avec 25,6 décès par an.
Enfin l’évaluation du stock de neige est un marqueur important du changement climatique, ce qui permet de donner des informations importantes sur son évolution au cours du temps.
La mesure de la neige, qu'elle mesure un flux ou un stock, est comme on l’a vu complexe et diverse. Mais malgré ses limites, c’est une mesure météorologique essentielle et nécessaire pour de nombreux aspects économiques, environnementaux, climatiques et sociétaux. C’est pourquoi, la mesure de neige reste un enjeux important et qui est toujours en plein développement, malgré l’impact du réchauffement climatique qui limite les températures négatives, notamment aux latitudes tempérées.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Nivomètre
https://meteocentre.com/intermet/instrument/nivometre.htm
https://www.meteosuisse.admin.ch/portrait/meteosuisse-blog/fr/2024/01/mesure-neige.html
https://www.grenoble-inp.fr/fr/recherche-valorisation/des-neutrons-pour-mesurer-la-couche-de-neige
https://arc.lib.montana.edu/snow-science/objects/ISSW13_paper_O2-08.pdf
https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Pyrenees_Mountains_view_from_satellite.jpg
https://www.montagnes-magazine.com/actus-avalanches-les-bilans-dernieres-saisons